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20100420

Peter Coffin chez Emmanuel Perrotin

Voici le début d'une série d'articles pour fauchés amateurs de sensations contemporaines : admirer de l'art présent en galeries ne coûte pas un sous et fait fructifier l'œil.
Direction : 3e arrondissement - les terrasses ensoleillées de cafés de la rue de Turenne découpent les filles en tranches Vanessa Bruno / Marlboro et coca, light tous deux / sandales Isabel Marant et sac Jérôme Dreyfus nonchalamment peu entretenu. Les gens du quartier forment des petites sommes rondelettes de stéréotypes. On/je ressemble à peu de chose près à ça avec en prime le bon goût de fumer des Lucky Strike parce que le paquet est signé Loewy et d'aller chez Manu Perrotin moins pour m'y faire voir (y a un aveu là : le moins n'est malheureusement pas la nullité) que pour admirer les œuvres de Peter Coffin.

Peter Coffin (1972), Untitled (Sculpture Silhouette suite 1, 2, 3), 2010
3 x 13 silhouettes de sculptures en métal poli, socle : 120 x 121 x 213 cm chacun
Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris 

Né en 1972, Coffin doit être un de ces trentenaires bavards, zappeurs et consuméristes qui a dû prétendre mixer de la house au milieu des années 90. Il jaquasse en wall painting, triture en sculpture, fait des appartés en installations, remasterise en photos... Dans le cadre de l'exposition The Colors are Bright chez Perrotin, Coffin s'attaque à la culture visuelle contemporaine. 

Peter Coffin (1972), Untitled (Sculpture Silhouette suite 1, 2, 3), 2010
à gauche : Vladimir Tatline, Monument à la IIIe Internationale, 1919-1920 // à droite : Joseph Beuys, Fat Chair, 1964
Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris

Dans la première salle, à gauche en entrant, trois socles massifs reçoivent dans un dispositif pulsionnel des dizaines de silhouettes en miroir évoquant de grandes oeuvres de l'histoire de l'art. Pourtant cette somme irrationnelle de fantasmes éclate la chronologie : la Venus de Willendorf jouxte la chaise graisseuse de Joseph Beuys (Fat Chair, 1964), Tatline, Newman, Miro font volte face (ou est-ce l'inverse ?) devant les antiques grecs ou les volumes totémiques de l'Ile de Pâques. La suite est unitaire par sa spontanéité.

Peter Coffin (1972), Untitled (Hollow Log with Model of the Universe), 2010
Tronc d'arbre, spots multicolores, 91,5 cm de diamètre x 140 cm
Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris

Tout au long de l'exposition, Coffin qui a finalisé les installations parisiennes, fait déchoir les transcendances des icônes des avants-gardes historiques, colle dans une caricature daft punkienne d'Arte Povera des spotlights dignes d'une boîte de nuit pour quinqua craquant et femmes dont la beauté est un précédent. Les néons linéaires de Dan Flavin par exemple, ceux spiralés de Nauman se nouent avec naïveté. On touche ici les relations désagrégeantes qu'entretiennent matérialité et volume (tronc, néon) avec l'immatérialité texturée de la lumière.


Dans la salle suivante, un feu, sans chaleur et un chien bien vivant passant par là (il est le portrait craché de Man Ray de Wegman).
Un vidéo-projecteur imprime froidement un brasier virtuel en noir et blanc. Cette œuvre-là moins ludique et un peu plus conceptuelle, s'avère décisive à la compréhension de l'exposition. Car si le feu n'est pas une iconographie sans symbolisme, s'il renvoie au complexe prométhéen, l'artiste se trouve aujourd'hui enchaîné au Caucase de la culture de masse. J'ai envie - Dieu que j'ai envie !- de fendre Bachelard au chapitre V de La Psychanalyse du feu, "la chimie du feu : histoire d'un faux problème"... il suffirait de soustraire au feu le terme d'"art" dans la première proposition le premier, pour ammorcer le début d'une réflexion.

Peter Coffin (1972), Untitled (Slow Motion Campfire), 2009
Vidéo. Courtesy Galerie Emmanuel Perrotin, Paris

Faisant suite à la poésie de la pyromanie potentielle dirigée contre le white cube, une salle obscure reçoit une installation mettant en abîme la grande institution culturelle parisienne : Untitled (Musée national d'art moderne - Centre Pompidou) est un assemblage de sons, vidéos et de tirages de photographies d'œuvres de la collection du MNAM. Coffin avait déjà fait ce coup-là à la Tate Britain en 2009 pour la Triennale.
Un faux Magritte (Le Viol, 1945) inflationniste et bouchue comme une américaine siliconée se met à déblatérer des irrévérences qui font sourire. Pour mieux réapparaître dans une lumière virginale, une frêle Joséphine Baker de Calder en fil de fer disparaît sous des filins psychédéliques :


Le coup le plus beau est asséné à la Composition en rouge, bleu et blanc II (1937) de Mondrian qui se met à clignoter au rythme de la petite musique de la Rencontre du troisième type. Comme une blague qui va trop loin, les couleurs néo-plastiques projetées sur la fausse peinture rigoriste s'enthousiasment jusqu'au débordement. Les couleurs primaires sont projetées parfois hors du cadre achevant ainsi par l'éclaboussure chromatique la virtualité d'expansion des compositions en all over de Piet.


Puis c'est sur la flamboyance de la Tocatta et Fugue et en Ré mineur (BWV 565) de Bach, le morceau pour orgue le plus connu de l'histoire de la musique, que bleu, rouge et jaune se déhanchent.
La personne qui m'accompagnait a souri ; moi, j'étais hilare. Pourquoi ça ? Parce que comme pour toute absurdité, la logique y est irrésistible. Parce que je m'y retrouve. Parce que c'est irresponsable autant qu'intelligent. Aussi parce que même si Lyotard l'avait écrit dans la Condition postmoderne, je n'aurais jamais cru voir le métarécit blêmir sous l'insolence de lumières fluos.

Vous avez jusqu'au 7 mai 2010 pour vous rendre au 76 rue de Turenne d'un pas rythmé par Alive des Daft Punk. 
Cynisme, lassitude contemporaine et simili cuir s'abstenir.

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